Je vais peu sur les blogs, mais celui de Stéphanie me ravit.
Humour et créativité au rendez-vous sans prise de tête.
Son article sur le F.U.C.K. Club a résonné fortement en moi.
J'ai immédiatement adhéré à son club - le règlement est ici - et reçu ma carte de membre avec beaucoup de fierté.
Oui mais voilà, depuis un mois, je ne suis que l'ombre de moi-même, physiquement et moralement, alors bavasser sur une quelconque création pour jouer le jeu du F.U.C.K. Club, c'était bien au-delà de mes possibilités.
A défaut de respecter l'article 3 du Club, je vais au moins respecter l'article 4 en disant F.U.C.K. à mon Burn-out, malheureusement pas du mois dernier mais de la dernière décennie, ne m'en demandez pas plus, je vous l'ai dit, je suis un peu voire beaucoup à côté de mes pompes.
F.U.C.K. MON BURN OUT
Récemment, je me suis dévoilée comme jamais, même si celles qui savent lire entre les lignes, savaient déjà.
Pourquoi libérer la parole ainsi et maintenant ?
La pudeur, la « taisance », c’est un concept franco-français.
Surtout ne pas dire aux autres qu’on les aime, ils pourraient en profiter !
Surtout ne pas dire à notre enfant qu’il est beau et intelligent, il pourrait le croire !
Au contraire, le rabaisser pour qu’il reste humble, lui rappeler ses défauts, notre « douce» philosophie judéo chrétienne !
Surtout ne pas parler de nos échecs, ils pourraient être contagieux ou nous définir définitivement !
Heureusement la psychologie positive et un vent de « allez, on s’dit tout » anglo-saxon font bouger ces fondations qui mènent souvent à des êtres mal dans leur peau.
Bref, il faut que tout ce que je retiens au fond de moi s’exprime une bonne fois pour toute, que je dépose mes valises, après on tournera la page.
Je pourrais le faire sur un bout de papier à la maison mais je sais que mon expérience parlera à beaucoup ( mon article sur l’alimentation a suscité énormément de retour ! ) et je veux désormais que mon blog reflète vraiment qui je suis, alors impudeur GO.
Je reculais à le faire parce que je ne voulais impliquer personne d’autre que moi dans ces mots afin de ne pas engendrer d'interprétations malheureuses.
Mais le constat est là, les éventuels intéressés me jetteront la pierre quels que soient mes mots, alors tant pis, je ne suis en rien responsable des interprétations que l’on pourra faire de mes paroles, aussi respectueuses soient-elles.
Épuisement professionnel, maladie inflammatoire, dépression, et j’en passe depuis 9 ans, le quotidien est ... ce qu’il est.
Celui qui a joué le premier rôle pendant une bonne partie de ces années d’errance et qui pourtant n’était que l’arbre qui cachait la forêt, c’est « mon » Burn Out ou Épuisement professionnel si les anglicismes te révulsent.
Ceci dit, je le trouve bien plus « parlant » en anglais qu’en Français, où il donne à penser qu’à force de ne pas dormir ( peu importe la raison ), tu n’as plus la force de travailler !
Alors que le Burn Out c’est un truc bien plus complexe et pernicieux !
Un vendredi 22 Novembre, jour de ma fête, le comble, fut mon dernier jour « dans le monde du travail ».
Parce que je n’ai plus été capable physiquement et moralement de vivre mon quotidien professionnel.
Tout avait pourtant bien commencé en décembre 1998, lorsque j’ai intégré cette grande entreprise, dans un domaine d’activité qui pour mon « environnement personnel » , était un signe certain de « réussite ».
La réussite, vaste sujet d'ailleurs ...
Là ou ailleurs, de toute façon, aucune différence pour moi, j’avais toujours mis mes aspirations bien cachées sous un mouchoir pour faire ce que l’on attendait de moi.
Je ne cherche pas de coupable, j’ai toujours très mollement résisté voire pas du tout, rentrer dans le moule, ne pas faire de vague, tel était mon leitmotiv, c’était tellement plus confortable.
Je ne partais donc pas dans les meilleures conditions pour m’épanouir dans cette boîte.
Sans compter ma précédente expérience déjà « épique » : validée en CDI par mon boss alors que la nouvelle direction ( suite à un rachat ) avait demandé expressément de mettre un terme à toutes les périodes d’essai ( ... ), j’avais passé 3 mois seule dans un bureau vide sans rien à faire attendant que je craque ( Cécile, le parfait mélange d’une mule et d’un cochon ) pour finir par m’envoyer sur un poste très loin de ce pourquoi j’avais intégré cette entreprise. Il m’avait déjà fallu 3 ans pour prendre la poudre d’escampette, 3 années mises à profit pour prendre 30 kilos d’angoisses tellement ce job m’emmenait déjà très loin de ce que j’étais. Finalement, je n'étais pas si « aveugle » que ça puisque mon corps a crié fort « Au secours !!! » une première fois, j'étais juste totalement « désincarnée », le corps d'un côté, l'esprit de l'autre, surtout NE PAS REFLECHIR, S'ANESTHESIER POUR AVANCER ...
Tu comprendras que je partais ultra fragilisée mais malgré tout grâce à ma grande naïveté, prête à retourner des montagnes.
Je crois que c’est une qualité que je me reconnais sans sourciller : cette capacité à avancer comme un bulldozer sans à priori mais est-ce vraiment toujours une qualité ?! ... Fuir parfois est en fait la seule solution acceptable mais je l’ai compris bien trop tard ... et ça ne fait pas du fuyard un faible, bien au contraire, ça aussi c'est encore très compliqué à entendre.
Mais si autant lors de mon précédent poste mon diplôme et ma féminité avait été des données absolument «banales », j’ai découvert que ces deux « caractéristiques » personnelles étaient de vilains gros défauts dans cette structure ultra conservatrice, sans compte la cerise sur le hamburger : ma jeunesse.
Ajoutons à cela, en toute modestie, une capacité à apprendre très vite ( bien trop vite à tel point que ça en était suspect ! ), forcément ça ne pouvait que mal se terminer d’autant plus que je n’en avais absolument pas conscience.
Mon premier poste a été quasi idyllique au regard des deux suivants avec un environnement plutôt respectueux et bienveillant.
Je suis tombée très bas lors de mon second poste où dès le début mes « caractéristiques » ont posé problème à mon supérieur, qui me l'a clairement dit, et qui a pris un malin plaisir à détruire ma réputation aux yeux de la «hiérarchie» ( des âmes charitables s'étant chargées de m'en informer ).
Ce fut d’autant plus douloureux que bien que non formée par mon supérieur j’ai acquis rapidement des compétences qui m’ont permis d’avoir de bons résultats et d’être autant appréciée par mes clients que par mes collègues.
Cette dichotomie était vraiment épuisante.
C’est à ce moment là que ma maladie inflammatoire a ... flambé.
Oui j’aurais pu être moins compétente, moins impliquée mais sincèrement je n’avais pas l’impression d’en faire des tonnes je faisais mon job point barre ...
{ Parenthèse importante :
Notre éducation judéo-chrétienne nous invite à courber l’échine et à minimiser nos qualités comme si nous allions être foudroyé de tant de prétention ! Mais connaître ses compétences, les utiliser et s’en féliciter, n’empêche en rien l’humilité ! Rien ne me gonfle plus que de m'entendre répondre à un « Ah je suis fière de moi, c’est beau ce que j’ai fait », par un « C’est la Sainte Parfaite aujourd’hui ?! ».
Et bien non, pas d’accord, je ne m’excuserai plus de me trouver de la valeur parce que j’ai suffisamment courbé l’échine ! Et tous ceux qui me connaissent savent que ce n’est pas pour autant que je me mets en avant, au contraire.
Fin de la parenthèse }
Quand la prime « à la tronche » est tombée, son montant m’a clairement exprimée le peu de considération de ma hiérarchie.
Puis des problèmes de santé m’ont éloignée 2 mois du bureau et alors qu’on m’avait explicitement dit que j’allais végéter à mon poste un bout de temps ( garder sous sa « coupe » un bon petit soldat qui fait plus que son job - j’ai pendant 5 mois occupé deux fonctions à responsabilité - et qui bien que dévalorisé, continue à bosser, pourquoi s’en priver ? ) on m’a proposée une promotion ( un mi-temps thérapeutique se profilait, il fallait apparemment se débarrasser de moi, conclusions pas si alambiquées que ça du dernier médecin du travail qui m'a suivie ... ), promotion que je savais pourtant être un panier de crabe ( le mec qui quittait le poste m'avait dressée un portrait inquiétant de mon futur boss ) .
Pourquoi n’ai-je pas pris mes jambes à mon cou ? Parce que naïvement je n’avais pas vu le loup ... A ce moment là, j’ai « vraiment » cru qu’on reconnaissait enfin mes compétences ... Ce foutu besoin de reconnaissance ( sur le papier c’était une promotion assez chouette ! ), ce manque de confiance en moi ( si déjà ici on me fait vivre l’enfer c’est bien que je le mérite, c’est mon attitude qui en est responsable, je ne suis pas assez «cela », trop «ceci », pourquoi ça serait différent dans une autre entreprise ?!), cette peur de l’inconnu et d’entraîner avec moi les miens ...
Alors j’ai signé et tout a recommencé comme en 14 ! Tout a pris vraiment de l’ampleur au bout d’un an de poste quand l’Audit m’a félicitée de façon un peu trop appuyée pour la réalisation d’un objectif qui m’avait été confiée à mon arrivée sur le poste. Encore une fois, j’avais vraiment le sentiment de n’avoir fait que mon boulot, j’avais juste envie qu’on me laisse bosser tranquillement ...
Je ne rentrerai pas dans les détails de ce que m’ont fait vivre mes hiérarchies sur ces deux postes ( je pourrais écrire un bouquin et puis tu ne me croirais pas en plus ! ), mais quand tes collègues dès qu’ils te croisent te demandent comment tu fais pour tenir le coup devant tant de malveillance, et que la question se répète régulièrement, c’est bien qu’il y a un VRAI problème et que tu n’en es pas la responsable mais la victime, non ?
Puis il arrive un moment où tu frôles inconsciemment les fossés d’un peu trop près en allant bosser en bagnole, où en arrivant au boulot tu ne te souviens plus d’avoir fait la route, ou tu pleures entre chaque rdv, où tu ne vois plus de solution parce que tu as l’impression de donner le meilleur de toi même mais ça n’est jamais assez, où on te met clairement des bâtons dans les roues pour que tu trébuches, où les résultats sont forcément pourris puisqu’on t’enlève absolument tous les moyens qui te permettraient de « réussir » ...
Alors tu ne trébuches pas, tu t’effondres comme une grosse merde !
Parce que tu te sens coupable d’avoir failli à ta tâche.
Parce que tu aurais dû faire face à l’adversité.
Parce que ça ne peut être que de ta faute !
Forcément ton attitude n’était pas la bonne.
Tu n’as pas assez courbé l’échine.
Tu préfères oublier qu'une grande partie de tes collègues et tes clients t’appréciaient, ils manquaient sans doute d’objectivité ...
Tu mets de côté que tu as été confrontée à des hommes misogynes, qui n’ont pas supporté qu’une nana puisse faire son job et encore moins malgré les obstacles ...
Les Prud’hommes ? Trop au fond du trou pour y songer. Et puis à quoi bon ...
Même entendre une assistante sociale me dire que je n’avais pas failli, que la plupart des gens auraient craqué bien avant vu ce que j’avais subi, ça n’a pas suffit à me faire remonter la pente.
Parce que l’entreprise n’a pas pris la mesure de ce que j’avais vécu, parce qu’on m’a demandée de passer vite à autre chose et d’oublier.
Impossible d’oublier, de tourner la page, c’était bien trop « grave » pour moi d’avoir failli, cette manie de donner une importance démesurée à TOUT, de ne jamais m’accorder de bienveillance alors que je le fais tellement naturellement pour les autres ( enfin pas avec les cons, je suis loin d'être parfaite ).
Alors tu t’enfermes chez toi pendant des années en ruminant que tu as raté ta vie, la maladie inflammatoire explose, tu dépéris.
Les batteries complètement déchargées, une intolérance totale au moindre grain de sable, des douleurs rhumatismales exacerbées par un mental en bouillie ...
Les médecins te bourrent de saloperies : Anti inflammatoires, anti douleurs, anti dépresseur, morphine pour bâillonner un peu plus ce qui devrait en réalité s’exprimer !
Une loque sur un canapé ... le pauvre a la marque de mon postérieur qui s’y est imprimé ...
Je ne m’étendrai pas sur le soutien de l’entourage, ceux qui étaient là étaient là, savent la reconnaissance que j’ai pour eux ( pas certaine que je l’ai assez verbalisée, encore un truc à travailler, tu sais le « savoir dire aux autres qu’on les aime » autrement qu’en leur cuisinant un bon repas, mon substitut perso bien rodé ), les autres ont toute mon indifférence.
Parce que oui avant cet événement, ma vie c’était le boulot malgré la famille que j’avais construite, la valeur « travail » dirigeait mon existence ... c’est dire si je n’avais rien compris à la vie ...
Et puis un jour tu cherches à comprendre ce qui a fait le lit de tout ça.
Un jour, tu acceptes que tu n’étais pas coupable, que tu avais juste trop donné de ta personne et mal forcément.
Que ce besoin de reconnaissance qui t’étouffe vient de très loin comme cette incapacité à définir les vraies priorités d’une vie.
Que pour tourner définitivement la page de ce Burn Out, il faudra digérer bien des choses parce qu’il n’est évidemment que l’arbre qui cache la forêt. Et qu’on a beau comprendre tout ça, s’en sortir sans aide c’est peine perdue.
9 ans pour accepter tout « ça » parce que tu as bien compris que quand je fais les choses je les fais ... trop bien ... donc 9 ans ...
Aujourd’hui j’ai compris que le problème n’était ni cette entreprise en particulier ni totalement moi ( j’ai encore un peu de mal à dire « pas du tout moi » ), mais la conjonction de personnalités écrasées par la pression et tributaires de valises trop lourdes à porter. Parce que fort heureusement, nous ne sommes pas tous égaux devant le Burn Out, comme nous ne sommes pas tous voués à être des managers oppressants, notre histoire personnelle nous y mène ...
Aujourd’hui je sais que je n’ai pas démérité , que j’ai un paquet de compétences qui seraient bien utiles dans le monde de l’entreprise ( prétentieuse va ! #humour ).
Mais pas l’entreprise où l’humain n’est qu’un numéro manipulable à merci ... et j’ai bien peur que le management à la Française ne produise que ce genre d’entreprise ...
Bon ok, mon optimisme naturel ( ou ma naiveté ! ) me pousse à espérer qu’il existe aussi en France des tas de patrons qui ont envie de faire grandir leurs salariés autant que leur entreprise !
Cette incapacité à me réinsérer dans le monde du travail me pèse tellement mais rien que l'idée de remettre ne serait-ce qu'un orteil dans le monde du travail me terrorise littéralement ...
Alors j’ai sur-investi mes « loisirs » pour continuer à « m'anesthésier », boosté cette créativité qui était bien cachée, j’ai reçu tellement d’encouragements et de bienveillance qui auraient dû me relever.
Mais mon corps ne cesse de me rappeler à l’ordre et de me coller de nouvelles limites éprouvantes pour mon mental qui avait retrouvé un peu de son allant …
{ Je ne voudrais pas que mes propos laissent à penser que les problèmes de santé, quels qu'ils soient, sont la conséquence d'un mal être mais on sait aujourd'hui combien les pathologies sont plus ou moins bien « vécues » voire aggravées selon que l'on est bien ou non dans sa tête ...}
Le « bénéfice » de cette chute a été malgré tout énorme, j’ai mis un terme à mon faux self, j’ai compris ce qui était fondamental pour moi dans la vie, j’ai découvert que j’étais « aimable » et pas ce « monstre de travail » qui me définissait quasi exclusivement ( enfin que je croyais ), j’ai laissé surgir ma créativité qui était bien enfouie très profond et j’ai accepté que « créer » soit aussi vital pour moi que respirer …
Bah oui les artistes sont forcément des « dégénérés » qui se droguent et vivent aux crochets de la société , me disait la petit voix dans ma valise ...
BREF je ne me suis pas relevée d’un Burn Out mais je me suis éveillée à mon essentiel, et c’est déjà un pas de géant ...
Ce texte est long et précis parce que je veux prêter le moins possible à interprétation ou polémique. Même si je sais bien que nous lisons avec le concours de filtres personnels qui nous poussent à interpréter des phrases parfois anodines. Tu as peut-être été un manager oppressant, moi aussi sans aucun doute mais nous ne nous définissons pas qu’ainsi d’autant moins si nous avons fait un travail personnel pour changer. Bon sincèrement le dernier en date que j’ai subi je lui conseille de ne pas croiser ma route sinon je pourrais bien l’émasculer ( mais je t’assure je suis passée à autre chose ... ). Attention, je ne m’excuse en rien de mes paroles, chaque phrase est plus que réfléchie ! Mais je ne veux faire ici le procès de personne, je pose juste définitivement des valises qui n’étaient en plus pas forcément les miennes.